En ce moment, les médias parlent de la crise économique et de son corollaire c'est-à-dire les fermetures d’usines, ce qui équivaut à des reclassements et surtout du chômage pour le plus grand nombre. En amont, les salariés sont confrontés à la rupture conventionnelle qui sévit notamment dans les petites entreprises. La rupture conventionnelle aurait-elle trop fluidifié le marché du travail ?
Selon les articles L. 1237-11 à L. 1237-16 du Code du travail, issus de la loi n°2008-596 du 25 juin 2008 « portant modernisation du marché du travail » (JO du 26 juin), l’employeur et le salarié peuvent convenir d’un commun accord des conditions de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée (CDI) qui les lie. Cette rupture du contrat de travail doit respecter une procédure spécifique : entretien(s) entre les deux parties, homologation de la convention… Elle est entourée de garanties pour le salarié et lui permettent de bénéficier de l’allocation d’assurance chômage. Elle est exclusive du licenciement ou de la démission, elle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.

Une vigilance des autorités compétentes
La rupture conventionnelle peut être annulée par les juges et produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (avec les indemnités qui en découlent pour le salarié) lorsqu’ils estiment que le salarié était, au moment de la signature de l’acte de rupture conventionnelle, dans une situation de violence morale du fait du harcèlement moral dont ils ont constaté l’existence et des troubles psychologiques qui en découlent (arrêt de la Cour de cassation du 30 janvier 2013). Par ailleurs, elle ne peut être utilisée comme un moyen de contourner les règles du licenciement économique collectif et donc de priver, les salariés des garanties attachées aux accords de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et aux plans de sauvegarde de l’emploi (PSE). De ce fait, le salarié doit être préalablement informé de ses droits afin qu’il puisse opter ou non en connaissance de cause pour une rupture conventionnelle.

Entre rétractation et homologation
Afin d’éviter les décisions trop hâtives, la loi impose un délai entre la signature de la convention et sa transmission à l’autorité administrative pour homologation en laissant à chacune des parties le temps de mesurer la portée de sa décision.
A compter de la date de signature de la convention par l’employeur et le salarié, l’un et l’autre dispose d’un délai de 15 jours calendaires (tous les jours de la semaine sont comptabilisés) pour exercer la rétractation. Celui-ci est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa réception par l’autre partie.
A l’issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d’homologation à l’autorité administrative compétente, c’est-à-dire, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) avec un exemplaire de la convention de rupture. Cette demande doit être effectuée au moyen du formulaire réglementaire fixé par l’arrêté du 8 février 2012 (JO du 17).
L’autorité administrative dispose d’un délai de 15 jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour s’assurer du respect de la liberté de consentement des parties et des conditions prévues par le Code du travail. A défaut de notification dans ce délai, l’homologation est réputée acquise. Il s’agit d’une homologation « tacite » ou « implicite » et l’autorité administrative.
Aucun « préavis » n’est prévu dans la cadre de la rupture conventionnelle du contrat de travail à durée indéterminée. Ce terme est réservé au licenciement et à la démission. Néanmoins, rien n’empêche les parties de prévoir une date de rupture de contrat de travail raisonnable, et qui sera plus ou moins éloignée de la date minimale qu’est la certitude que l’homologation n’a pas été refusée par le DIRECCTE.
Le propre de la rupture conventionnelle, côté employeur, est le consentement donné par le salarié à sa rupture, lequel explique l’extrême faiblesse du contentieux post RC – moins de 0,1%. Or le contentieux est un levier de régulation sociale. Il ne faudrait pas le gripper face à la montée des risques psychosociaux.

Toutefois, la crise économique que nous traversons rend un jugement définitif impossible à ce stade. Ce qui peut paraître une aubaine pour les uns peut pour les autres se révéler comme un cadeau empoisonné.

P S.

Ce qui change en 2013.

La loi de financement de la Sécurité Sociale prévoit qu’à partir du 1er janvier 2013, l’indemnité de rupture conventionnelle sera soumise au forfait social de 20% dès le premier euro. Les indemnités dont le montant est égal à l’indemnité conventionnelle ou légale de licenciement sont ainsi exonérées d’impôt sur le revenu quel que soit leur montant de cotisations, de CSG et de CRDS dans la limite de deux fois le plafond annuel de sécurité sociale (soit 74 064 en 2013). 

Salarié protégé.

Toutefois, la rupture conventionnelle peut s’appliquer aux salariés protégés (délégués du personnel, délégués syndicaux, membre élu du comité d’entreprise, etc.). Dans ce cas, c’est une dérogation aux précédentes dispositions qui s’applique. La rupture conventionnelle est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail dans les conditions du droit commun prévues par le code du travail. 

Convention et litiges.

Le conseil de Prud’hommes est seul compétent concernant les litiges sur la convention, l’homologation ou le refus d’homologation. Tout autre recours administratif est exclu (sauf pour les salariés protégés dans le cadre de l’autorisation de rupture conventionnelle. Le recours juridictionnel devant le conseil de Prud’hommes doit être formé, sous peine d’irrecevabilité, avant expiration d’un délai de 12 mois à compter de la date d’homologation de la convention.



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